22 février 2021

Question orale de M. Matthieu Daele à M. Pierre-Yves Jeholet, ministre-président, intitulée

«Prise en compte du mal-être de nos concitoyens, des facteurs humains et sociaux lors du prochain Comité de concertation (Codeco)»

M. Matthieu Daele (Ecolo).

Ce week-end, les acteurs culturels se sont mobilisés et ont appelé à l’aide au travers de l’action Still Standing for Culture. La semaine précédente, les jeunes et leurs parents s’étaient mobilisés au travers de l’action Trace ton cercle. Ces actions démontrent que bon nombre de nos concitoyens considèrent aujourd’hui que nous sacrifions le bien-être social au profit de la sécurité sanitaire. Il est temps de changer cette logique. Il ne s’agit pas de sacrifier la sécurité sanitaire au profit du bien-être social, mais bien de concilier l’une et l’autre.

Lors de la réunion du Comité de concertation (Codeco) du 5 février dernier, nous n’avons pas répondu aux attentes, aux espoirs et à la soif de perspectives de nombre de nos concitoyens. Nous avons récemment débattu au sein de notre assemblée du mal-être croissant des enfants et des jeunes. En raison de cette crise sanitaire qui n’en finit pas, ces derniers sont en effet privés d’activités culturelles, sportives et de liens sociaux. Nombre de questions, d’attentes et de messages à des secteurs entiers de notre société sont restés en suspens et ont été, dans le meilleur des cas, reportés à la réunion du Codeco qui aura lieu le 26 février prochain.

Les acteurs culturels espèrent ainsi l’annonce d’un printemps au terme de cet hiver trop long. Avec eux, les jeunes aspirent à élargir leur bulle, les étudiants rêvent de retrouver les auditoires, les enseignants réclament des vaccins et des parents désespèrent de renouer des liens avec un enfant placé. Ce ne sont là que quelques exemples de conséquences des mesures prises pour limiter l’évolution de la pandémie. Mais ces conséquences comptent parmi les plus graves, parce qu’elles nous touchent dans ce que nous avons de plus précieux: notre humanité. Le groupe Ecolo pense que les curseurs sociétaux doivent évoluer. Une prise de conscience sociétale et politique est nécessaire. Nous ne pouvons plus admettre que la société ne prenne en considération que l’aspect sanitaire des choses, au détriment des aspects humain et émotionnel. Il faut donc pleinement et courageusement nous tenir aux côtés de celles et ceux qui appellent à plus de vie face à la pandémie.

Monsieur le Ministre-Président, à l’aune de ces dimensions qui sont au cœur des politiques de notre Fédération, quel bilan tirez-vous de la réunion du Codeco du 5février dernier? Comment vous préparez-vous à la prochaine réunion du Codeco, le 26 février? Confirmez-vous la mise à l’ordre du jour d’un point culture à cette occasion? Plus largement, comment entendez-vous aborder le mal-être des jeunes, des familles, des sportifs et d’un nombre croissant de nos concitoyens? Quelles réponses concrètes espérez-vous obtenir à l’occasion de cette réunion?

M. Pierre-Yves Jeholet (MR)

Lors de la réunion du Codeco du 5 février dernier, nous avons convenu que le groupe d’experts en charge de l’Exit Strategy (GEES) nous ferait parvenir une série de feuilles de route et de perspectives à transmettre à l’ensemble des secteurs : ceux relevant des compétences de notre Fédération, mais également ceux relevant d’autres niveaux de pouvoir comme, par exemple, le secteur horeca ou les métiers de contact. À ma demande, lors de cette même réunion, j’ai souhaité que l’on revienne également sur les chiffres et les indicateurs qui avaient été déterminés à la fin du mois de novembre 2020, tout en tenant compte de l’absence de campagne de vaccination à ce moment-là.

Le contexte actuel est tout à fait différent, puisque nous avons entamé une vaste campagne de vaccination. Comme je l’ai dit ouvertement lors de la dernière réunion du Codeco, il convient de revoir ces indicateurs et notamment d’insister sur le nombre limite d’admissions dans les hôpitaux afin d’éviter leur saturation et celle du personnel médical et soignant. Les experts et virologues ont leur propre analyse du déconfinement. À toutes fins utiles, je rappelle que le Codeco est le seul organe décisionnel en cette matière et de nouvelles décisions seront prises à l’occasion de sa prochaine réunion, ce vendredi 26 février.

Une fois de plus, j’ai été surpris par les déclarations du ministre fédéral de la Santé, Frank Vandenbroucke, ce dimanche 21 février. En effet, celles-ci ne laissent quasiment aucune perspective au Codeco. Pourtant, sur la forme, M. Vandenbroucke ne peut prendre de décision qu’avec le concours du Codeco et des entités fédérées. Nous devons donc assurer une coordination et garder notre sang-froid quant aux décisions à prendre. Nous ne pourrons pas procéder à un déconfinement généralisé vendredi prochain, pas plus qu’au courant du mois de mars. Nous devons encore nous montrer vigilants et prudents vis-à-vis des variants du virus, afin de ne pas anéantir tous les efforts consentis par la population depuis plus d’un an. Parallèlement, il nous faut d’ores et déjà envisager un déconfinement futur et un retour progressif à la vie normale.

Beaucoup de partis politiques reprennent la formule que j’ai déjà utilisée il y a plusieurs semaines et demandent que nous passions d’une gestion de crise à une gestion des risques. À ce sujet, il faut évidemment maintenir un équilibre et veiller à ne pas retomber dans une situation difficile sur le plan sanitaire. Outre la vigilance dont nous devons faire preuve, il nous faut tenir compte de différents paramètres: le retour du beau temps, la progression de la vaccination qui représente notre ticket vers la liberté, le nombre de personnes qui ont été officiellement contaminées en Belgique, en ce compris celles qui n’en ont pas eu connaissance, etc. À l’heure actuelle, il y a une envie de déconfinement et d’assouplissement progressif de différentes mesures dans plusieurs secteurs.

Nous ne pouvons pas rester indifférents au ressenti de la population aujourd’hui. Il y a un ras-le-bol par rapport aux privations de liberté avec des dégâts collatéraux d’envergure au niveau de la santé mentale des jeunes, mais aussi de la population en général. Ces constats doivent guider nos prises de décisions. J’ajoute que je suis réceptif à la détresse de nos aînés, à l’inquiétude des jeunes, à celle de leurs parents… Ces craintes doivent être prises en considération. Les artistes et représentants du monde de la culture ont fait entendre leur mécontentement de manière digne ce week-end et je n’y suis pas sourd.

Ce vendredi, lors de la réunion du Codeco, je plaiderai pour des mesures d’assouplissement raisonnables, mais aussi pour que l’on établisse des perspectives pour les semaines à venir. Nous devons toujours rester prudents, mais il était aussi prévu, après ce congé de Carnaval, d’évaluer la possibilité d’organiser des activités extrascolaires –qu’elles soient sportives, culturelles ou autres– pour les jeunes. En d’autres termes, je pense que les mesures relatives aux activités se déroulant à l’extérieur doivent être assouplies dans les domaines de la culture ou du sport. De nombreux protocoles ont été élaborés en collaboration avec les experts et représentants des différents secteurs. Ils prévoient différentes phases de déconfinement et il est temps de les présenter à nos concitoyens, aux mondes sportif et culturel, car ils sont porteurs de perspectives.

Je veillerai aussi évidemment à ce que les étudiants de l’enseignement supérieur puissent à nouveau fréquenter les campus le 15 mars au plus tard. Cela me semble essentiel. Dans une phase ultérieure, le gouvernement estime indispensable que les étudiants de l’enseignement obligatoire puissent retourner à 100% sur les bancs de l’école à partir de la fin des vacances de Pâques. Il s’agit de perspectives que nous voulons donner, toujours en faisant preuve de vigilance. Rappelons que les derniers chiffres ne font pas état de la diminution de la courbe espérée. Il faut néanmoins rendre de la liberté à nos concitoyens et procéder à des assouplissements progressifs dans l’ensemble des secteurs de la Fédération Wallonie-Bruxelles. En définitive, les questions relatives aux domaines de l’enseignement supérieur, du sport, de la culture, de la jeunesse, de l’accueil extrascolaire, de l’éducation en général –et donc, dans un second temps, de l’enseignement obligatoire– seront abordées à l’occasion de la réunion du Codeco de vendredi prochain.

M. Matthieu Daele (Ecolo).

Monsieur le Ministre-Président, nous comptons sur vous pour porter cette volonté de passer d’une gestion de crise à une gestion des risques lors de la réunion du Codeco de ce 26 février. C’est ce que réclament le secteur de la culture, l’horeca, les jeunes ou les opérateurs de l’enseignement. Il est temps aussi de reconsidérer cette fameuse bulle d’une personne dans le cadre de laquelle les contacts sont autorisés. J’ai l’impression que les citoyens qui respectent cette bulle d’une personne se comptent sur les doigts de la main. Les mesures en vigueur doivent être adaptées à la réalité, car elles n’ont plus aucun sens si elles ne sont respectées par personne. Il est clair qu’il convient de déconfiner en respectant un certain nombre de règles pour éviter le retour de flamme et ne pas balayer tous les efforts consentis jusqu’à présent. Avant toute chose, il convient de donner de l’air et des perspectives aux citoyens, de leur permettre de vivre, tout simplement.